Projet FLUXUS - par les élèves de Première option Hida du Lycée Jean Rostand - CAEN du 5 septembre au 11 décembre 2024


Genèse du projet 

Ce projet est porté par la mission EAC de la DGESCO, la DAAC et les Corps d’Inspection d’Education Musicale et Chant Choral de l’Académie de Normandie, rejoignant l’Académie des Hauts-de-France et l’Académie de Grenoble dans le cadre de la Saison de la Lituanie 2024.

La Saison de la Lituanie en France est mise en œuvre par l’Institut culturel lituanien et l’Institut français, en étroite collaboration avec l’ambassade de Lituanie en France, l’ambassade de France en Lituanie et l’Institut français de Lituanie, sous l’égide des ministères français de l’Europe et des Affaires étrangères et de la Culture et du ministère de la Culture de la République de Lituanie.

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Le commissariat de cette saison était confié à Virginija Vitkienė, docteure en histoire de l’art, critique d’art, commissaire de diverses exposition et directrice artistique de la Biennale de Kaunas entre 2009 et 2017.

Intervenant en Histoire des Arts en lycée à Caen depuis 2009 et au lycée Jean Rostand depuis 2010, il m’a été proposé de rejoindre la manifestation en raison de la paternité du mouvement Fluxus, attribuée au lituanien George Maciunas Jurgis Mačiūnas (1931-1978).
L’équipe enseignante mobilisée comporterait plusieurs des collègues constituant l’équipe d’Hida du lycée : Raphaëlle Mounier, professeure d’Histoire-Géographie, HGGSP, et coordinatrice de l’option Hida au lycée Rostand, avec qui nous avions déjà travaillé précédemment sur la question de terminale « John Cage, un artiste en son temps », à partir de 2018, Patricia Mercier, professeure de Lettres, Hida et BTS et Didier Savary, professeur d’Histoire-Géographie et Hida.

Mise en place du projet 

La place majeure occupée par Fluxus dans l’art du XXe siècle et l’importance donnée à la performance nous semblait correspondre à l’esprit de l’enseignement en classe de Première :

 une approche codisciplinaire, permettre aux élèves de comprendre les œuvres d’art non comme des représentations de la réalité mais comme des interprétations, détournements ou remises en cause de celle-ci, les inscrire dans la perspective d’une relation autonome aux œuvres et aux formes artistiques… le tout s’intégrant dans « la réalisation d’un projet collectif ».

La commande initiale portait sur une mise en activité, dès mai-juin 2024 d’élèves de collège de 4ème entrant en 3ème en septembre 2025, et des élèves de 2nde entrant en classe de 1ère en septembre 2025. Pour des raisons diverses (composition des classes en 2024 et « recomposition » des classes à la rentrée suivante, emploi du temps des élèves et des collègues, difficulté à mobiliser des élèves avec une grande interruption correspondant aux congés estivaux…), nous avons finalement décidé, avec les collègues, de limiter les participants à la classe de 1ère de l’option Hida du lycée. Le lycée Rostand propose l’Hida en spécialité en classes de Première et de Terminale, et l’enseignement en option en classe de Seconde.

Les questions matérielles réglées, nous avons pu, à partir du mois de mai 2024, nous atteler à la question, pour le moins complexe, du planning.

Il a été décidé de commencer les différents ateliers préparatoires dès le premier cours de l’année, le 05 septembre car la présentation finale de nos travaux et expérimentations devait avoir lieu au Théâtre de la Gaité Lyrique, à Paris, le mercredi 11 décembre, la préparation, ne pouvant s’étendre au maximum que sur un total de 12 séances de 2h.

Le projet FLUXUS

La classe était divisée en deux groupes (scénographie et son/musique) travaillant séparément puis réunis régulièrement afin de pouvoir observer et/ou s’inspirer de ce que faisait l’autre.

  • Le groupe scénographie travaillait à la réalisation d’un papier peint visuel, à la création de flux boxes, à l’écriture de lettres à George Maciunas suivant le principe de la correspondance cher à ce dernier, à la réalisation de panneaux, de tracts
  • Le second groupe dont je m’occupais devait réaliser la partie musicale et sonore du projet. Les élèves composant ce groupe étant majoritairement néophytes en musique, il fallait donc organiser une progression extrêmement rapide, mettant les élèves en situation dès la première séance.

Dans un premier temps nous avons donc exploré les bases du système musical à partir du Moyen-Age jusqu’au XIXe siècle (de la musique modale médiévale occidentale et extra-occidentale à la musique tonale), en pratiquant divers modes et gammes au clavier. Chaque élève est passé au clavier afin d’expérimenter ces divers modes et gammes. Une fois ces principes théoriques explicités, nous avons exploré les bases de la musique sérielle, ce qui permettait d’introduire et de faire le lien avec Fluxus, la performance et le happening.

George Maciunas était un proche de John Cage qui a suivi les cours de composition d’Arnold Schönberg (cela s’est plutôt très mal passé) entre 1935 et 1937. Schönberg ayant été l’un des promoteurs du système sériel dodécaphonique.

En s’inspirant du système sériel dodécaphonique, les élèves devaient opérer des chance operations (tirage au sort) grâce à des dés à 12 faces :

  • 12 faces pour les 12 notes de la série dodécaphonique (à 12 sons, soit 7 notes de la gamme majeure naturelle DO-RE-MI-FA-SOL-LA-SI + 5 notes altérées DO#-RE#-MI#-FA#-SOL#) : chaque dé est jeté 12 fois. Les élèves notaient le résultat des tirages au sort.
  • A chaque note du clavier était attribué un numéro (les notes Do à Si sont les touches blanches ; les notes Do# à La#, les touches noires) :
Série Dodécaphonique - Répartition des numéros par touches
Répartition des numéros par touches
DOREMIFASOLLASIDO#RE#FA#SOL#LA#
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
  • Chaque numéro correspondait également à un mouvement (librement déterminé par chacun : marche, saut…) du déplacement entre la position initiale du performer et le clavier ou autre instrument (guitare, basse).
  • Chaque numéro correspondait aussi à une action particulière sur l’instrument en-dehors du jeu sur une note déterminée (frapper sur l’instrument, sur les cordes de la table d’harmonie… = en référence à la préparation du piano telle que John Cage l’a pratiquée).
  • Les élèves avaient la possibilité de faire d’autres choix/interventions.

En plus de la pratique instrumentale directe, les élèves ont ensuite réalisé des enregistrements dans le lycée, ils avaient totale liberté quant à la source, au lieu, à la durée, avec toutefois une obligation de brièveté puisque leurs enregistrements devaient ensuite servir au montage sonore qui serait diffusé en même temps que le papier peint visuel.

Dans un dernier temps, nous avons fait la synthèse des éléments disponibles, tout d’abord avec le seul groupe « son-musique », puis lors de deux mises en commun en classe entière.

Retour sur l’expérience

Les témoignages recueillis à l’issue du projet mettent en évidence les craintes de la plupart des élèves avant la performance finale et, très largement, l’intérêt qu’ils/elles ont manifesté pour cette expérience.
Quelques élèves ont toutefois mis en avant la lenteur du processus (des élèves musiciennes notamment) et la gêne occasionnée par l’absence de « directionnalité » ressentie, volontaire car il était indispensable que les élèves soient en situation d’expérimentation quasi permanente afin de conserver l’esprit Fluxus.

De notre point de vue, cela questionne le rapport à la liberté totale d’improvisation, les élèves ayant du mal à se mobiliser dans une production en dehors de tout cadre contraignant. La gageure a donc été de parvenir à ce que les élèves trouvent du sens et adhèrent à ce projet évoluant dans un univers très particulier et ce, dans un temps extrêmement restreint, puisque la restitution avait lieu au mois de décembre.

André-Pierre Lacotte,
Professeur en EMCC et intervenant au Lycée Rostand, Caen

Jurgis Mačiūnas 2016 stamp of Lithuania

Public Limited Company Lietuvos Pastas, Public domain, via Wikimedia Commons

Retrouvez le timbre ici

Lien : Ici le lien vers le travail réalisé !

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